mardi 23 août 2016

Rice Padi Tour

Mardi 5 Juillet
Extérieur - Jour

Je devance le réveil et me lève aux aurores. Aujourd'hui, nous partons voir Bali ou du moins une partie de ce qu'elle a à offrir. Je m'autorise un café en plastique et j'écoute la vie, dehors.
Coqs, oiseaux, fontaines. Et si je tends l'oreille, j'entends des pas.
Le Pajar House est réveillé et déjà chacun s'affaire : fleurs de frangipaniers à semer, offrandes à déposer. Ces gens me donnent l'impression de ne jamais s'arrêter.
Moi qui ai su en une fraction de seconde oublier ma routine de citadine pour me vautrer dans le rythme improvisé des vacances...
Et même si je les remercie un peu trop, et même si je sais qu'ils font leur boulot, je reste gênée d'être servie chaque jour.
Pour preuve, le premier jour... j'ai refait mon lit moi-même. Oui. J'avoue. Tirer sur un drap housse et lisser une taie d'oreiller me semblait à ma portée.
Et oui, on m'a chambré comme il se doit.

Bref.

Il est 7h et il est grand temps de manger un pancake géant à l'ananas !
Par contre - notez bien - une fois que vous aurez goûté les pancakes de Bali vous ne pourrez plus apprécier les autres. C'est comme ça.

Aujourd'hui, nous avons un programme. Et en maître de cérémonie aguerri, Mel Gibson sera notre guide, notre chauffeur, notre ami et même - au mépris des plus grands dangers - mon sauveur.
En même temps, quand on se fait appeler Mel Gibson on a une réputation à tenir.
Nous avons opté pour le Rice Padi Tour.

Premier stop, les rizières en terrasses de Tegallalang. C'est à couper le souffle.



Déjà le trajet en voiture jusqu'au nord d'Ubud envoie du lourd. C'est vert. On se croirait en pleine jungle. Des fougères, des rizières, des arbres, des bougainvilliers, des lauriers, des rizières, des cocotiers et encore des rizières. Tegallalang c'est une carte postale. Mel s'est garé en bord de route et nous a accompagné sur ce panorama de fortune. Plongée vertigineuse vers le fond de cette plantation en terrasse. C'est tout simplement incroyable. Et beau. Après les photos d'usage, Debora, mon père et moi-même voulons aller voir en bas si c'est aussi beau. Qu'en haut. Pas de chemin ni de rambarde, ici on marche dans des sentiers improvisés à flanc de rizière et on enjambe les rochers. Tout allait bien quand je percute.
"Mais au fait, j'ai le vertige moi !?"
Avec une efficacité redoutable, mon cerveau procède à la mise hors service. Je me retrouve accroupie à mi-chemin.
Je me sens stupide. Et petite. Et vulnérable. Et je suis bien ennuyée car je ne me vois ni continuer la descente ni remonter. Et je ne me vois pas non plus passer le reste de ma longue vie entre deux niveaux. Aussi beau que soit ce paysage.
Mais c'était sans compter sur Mel. Ni une ni deux, ma belle soeur l'interpelle en anglais et lui demander de m'aider. Je vous assure que d'entendre "Mel Gibson, could you please help my sister-in-law to climb back ?" reste l'un de ces moments gravés à jamais.
Mel Gibson m'a donc aidé à remonter en me tenant fermement la main. Pour ma part, je n'ai jamais escaladé aussi vite de ma vie. J'étais sur la plateforme de départ en moins de temps qu'il n'en fallait pour vous l'écrire.
Bonjour l'ascenseur émotionnel, mais aucun regret. Ce que j'ai sous les yeux est tout simplement magique.



Nous repartons. Contents de retrouver la voiture climatisée. Il fait déjà chaud ici.
Prochaine destination : Le Rokky Temple.
Oui, après Mel Gibson. Rocky. Pourquoi pas.
Et là, nous allons descendre. Car ce temple est sculpté dans la montagne Kawi. Au pied de la montage. Tout en bas.
Et là je regrette de ne pas avoir compter les marches. Mais j'étais trop occupée à ne me concentrer pour ne pas me prendre les pieds dans mon sarong. Qui dit lieu saint, dit sarong. Et on n'aborde pas Rokky en mini short indécent.


On se croirait dans Indiana Jones. Le soleil joue à cache-cache dans les lianes, un torrent s'écoule dessous. Nous sommes au centre du monde, dominé par ces flancs, ces rizières et ce temple immense.
On se sent tout petit.
Mais déjà il est temps d'entreprendre l'ascension de ces escaliers. La chaleur nous accompagne mais nous arrivons heureux même si essoufflés à notre carrosse. On l'a fait !



Ensuite Mel nous emmène dans une plantation pour nous faire découvrir le Luwak coffee. Ou Kopi Luwak. Le luwak étant le nom d'une civette asiatique qui mange les fruits du caféier, qui sont sublimés dans son tube digestif (parfaitement, son tube digestif masterise la cerise) avant de rendre le noyau avec ses excréments (bon appétit).
N'empêche que civette sait faire un bon café. Etant plutôt amatrice de thé, j'ai goûté (oui, avec appréhension) et c'était bon. C'était du café. Assez fort.
Cette balade éducative nous donne à voir toute une végétation maraichère. Ananas, piments, bananes... et l'on croise quelques chats sauvages. Tous avec une queue cassée. J'ai beaucoup du mal à ne pas fondre sur eux pour quémander quelques ronrons.
Fin de la visite, place à la dégustation donc et là c'est la révélation pour mon palais. MY GOD le gingembre !! L'hibiscus, le mangoustan, le café à la vanille ou à la noix de coco !
Mais c'est le repère de toutes les tentations ici ! Je repars avec une réserve de thé jusqu'à la fin de l'année.

Il nous reste encore une visite mais l'heure est grave : on a faim. Mel nous dépose au bord d'une route, à l'entrée d'un restaurant en plein air, avec des bales surélevés, des poissons et un oiseau géant.
J'y goûterai - émue - ma toute première noix de coco.




Après le déjeuner, il nous reste à aller voir le Tampak Siring Temple pour ces Holy Water. En clair : une source d'eau sacrée qui coule dans le village de Tampak Siring.
Armés de nos sarongs, nous déambulons entre ces eaux et ces temples. Entre ces statues et ces touristes. Un immense séquoia nous accueille de ses branches accueillantes. Il en impose un max. Et l'encens - cet encens divin - nous enveloppe.







La chaleur, la fatigue se font sentir. Nous repartons pour l'hôtel et couvrons de remerciements notre Mel Gibson national. Il est temps d'aller se rafraîchir ! Ça tombe bien, le Pajar House a une piscine au milieu des rizières : quelle meilleure façon de finir ce Rice Tour ?!
On nous dépose en voiture et nous devons encore marcher pour atteindre ce Graal. Mais quelle vue !
C'est irréaliste de se baigner dans ce décor. Des citronnades fraîchement servies nous attendent. Les nuages s'amoncellent comme tous les soirs. C'est superbe !


Mais la journée n'est pas encore finie. Après une baignade express, il nous faut rentrer, nous changer et repartir passer la soirée à Ubud. Pour rentrer, aucun chauffeur n'est à notre disposition. Nous avons nos pieds ou la possibilité de rentrée en scooter avec un conducteur de la Pajar Pool. Grand Dieu, du scooter ici ?!
C'est avec une légère appréhension mais une grande excitation que j'enfourche cette mobylette, derrière ma conductrice toute fluette. Mon neveu est posté devant, entre ses jambes. C'est parti pour la virée de ma vie ! Moi qui aimais déjà le deux-roues...
J'ai eu peur quand on longeait le précipice, quand on tournait sur la route cabossée, et j'ai ri (mais tellement ri) quand on abordait les descentes. Les bras en l'air comme au Space Mountain à hurler de joie à grand renfort de you-ouh ! Dé-ment. Ma vie a défilé et je peux vous dire aujourd'hui que ce moment fait partie des meilleurs, maintenant que j'ai eu ma rétrospective.


Une fois à Ubud, nous avons quelques courses à faire pour anticiper notre séjour sur Gili Asahan car nous devinons que nous ne trouverons pas d'épicerie ni même une quelconque boutique là-bas.
Après un apéritif dans un bar bobo, mon frère nous emmène par les petites rues, vers un restaurant minuscule qu'il a repéré dans le guide.
Nous attendons. Longtemps. Très longtemps. Dans une salle à température ambiante, étroite. Mais quand nos assiettes arrivent, nous oublions vite ces récriminations : c'est délicieux. Boeuf saté, riz, petits légumes croquants. Ils savent vivre ces balinais !

Nous rentrons fourbus, mais émerveillés. Quelle journée ! Intense, riche... Que de découvertes, de ravissements pour nos yeux, nos oreilles, nos palais... Quelle douceur de vivre.

Bali - faut qu'je te dise - je tombe amoureuse de toi. De tout mon être. De toute mon âme.

mardi 16 août 2016

Ubud

Lundi 4 Juillet
Extérieur - Jour

Je me réveille avant l'heure, déboussolée, ne sachant plus où je me trouve. Puis je réalise. Je suis dans un lit immaculé, à l'abri derrière une moustiquaire. Il fait bon. Ce que j'entends ce sont les coqs de combat qui saluent ce nouveau soleil et derrière : la fontaine qui s'écoule dans la piscine. Je suis à l'hôtel Pajar House, près d'Ubud. Je suis à Bali. Je ne rêve pas.



Très vite je fonce tester cette douche improbable au milieu de ma magnifique salle de bain. Les pieds nus sur des galets, je finis de m'éveiller. Nous sommes Lundi, je n'ai jamais été aussi heureuse !

Une fois mes ablutions faites et la tenue trouvée (je m'obstine à chercher chaque matin ce que je vais porter alors que je sais d'avance que je choisirai un short et un débardeur, tout ça pour prolonger le port de ce kimono prêté par l'hôtel), je sors pour m'installer sur ma terrasse. Point de rendez-vous désormais officiel, je fais office de syndicat d'initiatives, armée comme je suis d'un menu qui propose des repas et des visites guidées.




Le ballet des serveurs a commencé et les tables se jonchent de pancakes, de fruits, de jus pressés et de ce café balinais épicé et délicieusement exotique. On dirait un café américain relevé, l'odeur du café et le goût du reviens-y.
Aujourd'hui nous avons prévu de nous reposer. Car même si la nuit a été profonde, il n'est pas question de griller toutes nos batteries dès l'arrivée.
Nous irons profiter de la piscine privative avant de déjeuner sur place. Une sieste n'est pas exclue mais finalement je reste et prolonge la discussion avec mon frère et ma belle soeur. Nous parlons voyages, projets. Je planifie ma venue pour voir leur quotidien au pays des kangourous. Je me réjouis de traverser à nouveau la planète.
Mes neveux dorment ou lisent. Les fleurs de frangipanier continuent d'embaumer, aidée par la chaleur de cet après-midi. Je suis bien ici.



Nous partons en fin d'après-midi pour Ubud. Comme l'impression de partir en virée à la capitale. Et pourtant Ubud n'a pas un tel titre. Mais elle est tellement vivante, vibrante. Notre chauffeur nous dépose devant le marché. Nous sommes rapidement étourdis par tous ces scooters et ces voitures. Le flot de touristes continue participe aussi. A peine arrivés, nous sommes ivres.



Nous commençons par acheter nos places pour le spectacle de danse et gamelan pour le soir même au Ubud Palace. Puis nous partons faire les boutiques. Je crois bien que nous nous sommes émerveillés devant chaque vitrine. Même les tongs nous ont ravi ! Nous marchons au milieu de la route, évitant les offrandes éventrés par des pieds maladroits. Ça grouille et le soleil se couche déjà.
Après une halte dans un bar tout ce qu'il y a de bobo (le vin de riz reste une grande révélation pour moi) avec ces occidentaux hippies et cette déco à couper le souffle, nous repartons pour le spectacle de Legong Dance.



Nous nous installons en bordure de scène. Nous commençons à ressentir la fatigue, mais nous attendons sagement... les joueurs de gamelan s'installent derrière leurs instruments d'or. Ça commence... Des sons, nouveaux, aigus, répétitifs... c'est lent. Presque faux.

Les danseuses apparaissent drapées de tissus incroyables et riches. Leurs mains me fascinent, leurs doigts graciles mais leurs yeux me mettent mal à l'aise. Elles sont comme possédées. (merci à Debora pour cette sublime photo !)


Pendant la première demi-heure je lutte littéralement avec un démon : celui du sommeil. Mes yeux ankylosés, se ferment. Je dois me concentrer fermement pour garder mon attention. Puis sans crier gare, le rythme change. D'autres danseurs se succèdent. Je commence à m'intéresser à l'histoire. Et je finis captivée après cette séance d'hypnose ! Quel voyage ! Et cette musique... je suis conquise !
Nous ressortons, secoués, les yeux et les oreilles chavirés par ces Dieux, démons et princesses...



Nous décidons de faire revenir notre chauffeur sans oublier de commander notre dîner par téléphone. Car si l'on mange divinement au Pajar House, il faut reconnaître que le service est un peu long, pour nous autres occidentaux stressés de la vie.

Nous patientons sur le bord de la route, amusés de voir une coccinelle d'époque trôner dans ce décor d'un autre monde !



Nous arrivons en même temps que nos plats. Une bintang pour trinquer à cette première journée riche en émotions et premières découvertes. Je savoure mon nasi goreng au rythme des gongs et autres métallophones qui résonnent encore dans ma tête.

Nous en profitons pour commencer à planifier notre prochaine journée. J'ai l'impression d'être ici depuis des jours et je me réjouis, rassurée, de savoir que j'ai encore une éternité devant moi pour m'imprégner de ce pays que j'aime déjà.

mercredi 27 juillet 2016

Bali

Dimanche 3 Juillet
Extérieur - Nuit

Bali.
Nous arrivons de nuit. Je suis incapable de vous dire si Bali est belle, si ses côtes sont délicatement découpées. Nous arrivons de nuit et nous voulons juste en avoir fini des avions. Enfin surtout des aéroports.

Après un voyage de 27 heures, nous sommes rincés. Nous atterrissons à Denpasar et personnellement j'attends encore de voir le nom de l'aéroport noir sur blanc pour être absolument certaine que oui, nous sommes à Bali.
Après l'instant cliffhanger pendant la récupération de nos bagages (j'ai vraiment cru que mon sac - lassé de ces changements incessants - avait fait halte à Djakarta ou c'était lui-même éjecté alors que nous survolions Mumbai), nous nous apprêtons à fouler le béton balinais.

Nous approchons de la sortie et là... sur la gauche. Deux visages connus. Et l'un des deux change progressivement de couleurs en nous voyant, avant de réaliser. Mission accomplie : neveu n°1 est surpris !

Mais nous ne sommes pas au bout (de nos surprises) (suivez un peu). Nous sortons et là BAM on se prend quelques kilos de chaleur sur les épaules.
Non mais c'est presque palpable. C'est doux, humide, lourd, enveloppant. C'est donc ça, la météo ici ?
Punaise, je n'étais vraiment pas préparée.
Mais j'adore !
Après les premières minutes, j'accepte de bon coeur cette température et retrouve mon frangin en plein discussion avec Mel Gibson.
Oui oui. Mel Gibson.
Enfin pas LE Mel Gibson. Mais le nôtre pour ces prochains jours et c'est son nom, usité au quotidien.
Classe, pas vrai ?

Mel (donc) nous conduit jusqu'à l'hôtel. Le Pajar House près d'Ubud.
La route est longue mais ne manque pas de piment. Déjà : ils roulent à gauche. Première nouvelle !
Je suis bien contente de ne l'avoir jamais passé ce permis !
Ensuite, on a l'impression qu'ils ont décidé de tous prendre leur véhicule ce soir. En même temps. Sur la même route. On croise des milliers de scooters, on ne voit que peu de casques, des voitures qui roulent toutes à 40 km/h (on respecte à mort les limitations de vitesse là-bas). On comprend vite pourquoi : la route c'est un machin pas vraiment lisse, pas vraiment droit, agrémenté deci delà de nids de poules, de chiens, de poules (des vraies), parfois des gens.
Nous arrivons assommés mais contents sur les coups de 21h.


Là. Ne me parlez plus. Ne me demandez pas ce que je veux dîner. Ne comptez sur moi pour rien. Je dois d'abord prendre une douche, changer de vêtements, et vapoter sur mon e-cig.
Laissez-moi tranquille !

Une demi-heure plus tard, détendue, je suis sur ma terrasse privative, j'attends mes invités (entendre par là mes parents et mon frangin et sa famille) car il a été convenu que les repas seront servis chez moi.
Je suis là. Fatiguée, abrutie par le voyage, je tangue mentalement, et j'écoute. Tous ces nouveaux sons. Les oiseaux, les criquets et d'autres bruits.
C'est clairement le premier moment exotique de mon séjour.
Ça et les odeurs.
Ils brûlent un encens dément ici et je me fais la promesse de ne pas repartir sans en avoir rempli mon sac.
Et je ne vous parle des fleurs de frangipaniers. Partout.

Puis la valse du service commence : c'est un ballet discret, orchestré. Des serveurs se succèdent et nous portent nos plats. La décoration se veut soignée. La Bintang n'est pas fraîche ? Quelle importance !
Nous sommes en train de boire de la bière tiède à BALI. BALI les mecs ! Alors la pression hein...



Et les plats... ce nasi goreng me régale. Comment ai-je pu aimer le riz toutes ces années sans avoir su comment le préparer aussi bien ?
Tout un monde s'ouvre à moi.

Si Si.

Mais l'heure tourne, et nos paires d'yeux papillonnent. Chacun regagne son bungalow. Je rejoins ma chambre et j'éteins la climatisation. (ben oui, maintenant que j'ai prêté allégeance à la chaleur ambiante, je ne vais pas la trahir à peine débarquée avec une insidieuse clim qui me fera éternuer toute la nuit !).
Je retourne une dernière fois admirer ma salle de bain. Hallucinante. Toutes de galets et de vert vêtue. Sans toit. Avec un accès direct aux bruits merveilleux de la Nature.



Enfin, il est temps que je me glisse sous ce drap frais, que j'ajuste la moustiquaire avant de plonger dans un sommeil réparateur.


jeudi 21 juillet 2016

Le Trac.

28 Janvier 2016.
Intérieur - Nuit.

J'apprends que ma famille a convenu de partir en voyage. Avec moi. Un voyage loin de la grisaille. Un voyage familial. Un voyage.

Ce mot était tellement poussiéreux dans mon cerveau ! "voy-a-ge"
Mon dernier voyage remontait à... (Ok. Le nombre d'années qui s'affiche sur mon compteur m'oblige à user de mon pouvoir de coquetterie pour ne pas l'exprimer autrement qu'en chiffres romains.)

Donc mon dernier vrai voyage (je ne parle pas de cet insipide séjour à Majorque il y a quelques années) a eu lieu en l'an MMVII. Je retournais à New York. Une ville que j'aime tendrement. J'ai toujours un petit pincement, au creux du ventre, quand je repense à Bleecker St. ou au Washington Sq.
Avant ça, j'avais visité l'Europe. En long en large et en travers. Avec l'objectif de toucher toutes les mers qui la bordent. Haaaa la Grèce... Les pizzas à Naples... Le gris azuré de Gdansk... La gentillesse des budapestois (j'ai été vérifié, ça se dit bien comme ça)... L'immaculée Tokyo. Barcelone il n'y a pas si longtemps. Londres.
Mais voilà. c'était il y a bien longtemps. Quand j'étais jeune.

Donc imaginez un peu. Vous êtes à côté de Paris. Emmitouflé(e) dans un plaid à bouclettes. Vous vous apprêtez à boire votre tisane au gingembre. Il fait nuit depuis 5 heures bien sûr. Il pleut depuis des lustres. Forcément. Je rappelle que nous sommes fin Janvier. Saison hautement divertissante dans cette contrée. Et là, au détour d'un mail qui vous vient tout droit de l'été, de l'autre hémisphère, de votre soeur, celle-la même mariée à votre frère, on vous propose de partir en voyage, avec eux. En Juillet.

En VOYAGE.

Les destinations de Bali, de la Malaise sont évoquées. Mais mon cerveau a déjà fait son choix. Ce sera Bali. Parce que durant toute son existence, à aucun moment, mon cerveau n'a rêvé aussi bien ou n'a eu la prétention d'imaginer qu'il prononcerait et visualiserait ce nom. Alors il s'est jeté sur l'occasion comme la pauvreté sur le tiers monde.
Bali. Ba. Li. Baaaaa. Liiiiii.
L'Indonésie quoi !
Le paradis en somme. Là. A portée de moi. A quelques mois. De moi. (oui, j'aime user et abuser des allitérations. Et des parenthèses)

Début Février, mon nouveau passeport était prêt à voler. Moi-même je frisais l'hystérie. J'ai passé les mois suivants à raconter à qui voulait bien l'entendre que je partais. Loin. Avec mes parents. Retrouver mon frère, ma soeur, leurs enfants.

Plus les mois se traînaient en longueur, plus ma langueur gagnait du terrain.
Pourtant ce voyage s'organisait. Les billets ont été achetés tout de suite. Des changements en cours de route m'ont donné quelques sueurs froides et m'ont fait basculer dans des colères sourdes contre le voyagiste.
Ma belle soeur (oui parce qu'elle est belle, c'est vrai) - quant à elle - s'occupaient de nous concocter un séjour inoubliable en dégottant des lieux magnifiques. Se renseignant. Passant des heures à éliminer les moindres faux pas d'accueil. Grâce à elle le programme se dessine. Ubud d'abord. Puis cette petite île au nom qui chante tant de promesses : Gili Asahan et son ecolodge paradisiaque. Et enfin Canggu (qu'on ne prononce finalement pas comme la voiture).

J'ai hâte mais Juillet me semble tellement loin. Le froid humide prend le pas sur toute initiative ici. Je sombre dans une routine bien déprimante et je souffre physiquement de ces températures bien tristounettes.

Quand subitement fin Juin est là !
Le soleil n'ayant pas daigné lardé ses rayons jusqu'à nous, je n'avais pas réalisé que l'été était arrivé. La pluie m'avait sérieusement induite en erreur faut dire. Jusqu'à mi-Juin je croyais dur comme fer que nous approchions de la Toussaint alors que nous avions largement dépassé les Saints de Glace.

Branle-bas de combat : je ne suis pas prête dans ma tête ! Et le reste n'est pas en reste non plus. Mon sac n'est pas commencé. J'ai survolé mon guide (j'ai regardé les photos donc). J'ai à peine commencé une liste de choses à ne pas oublier. Je procrastine. J'ai encore du mal à croire que je vais m'envoler pour ces séduisantes contrées.

Et pourtant...

2 Juillet 2016.
Intérieur- Jour.

Nous y voilà. Mes parents fraîchement arrivés la veille, nous émergeons d'une nuit chaotique, excités que nous sommes, comme trois enfants un matin de Noël qui tomberait aussi le jour de leur anniversaire et de Pâques. Les mystères du calendrier grégorien.

Nous faisons appel au bons services de monsieur Uber et partons sans comprendre pour l'illustre Charles de Gaulle. J'ai à peine câliné mon chat, paniquée que j'étais à l'idée d'oublier... d'oublier je ne sais quoi d'ailleurs, car de quoi aurais-je bien pu avoir besoin finalement ? A part de mon passeport et de mon entrain ?

Hilares, nous prenons possession des lieux. Gouailleuse et enjôleuse, je me mets dans la poche tous les gens que je croise. Mes blagues ne passent plus le filtre et fusent, sûres de leur effet.
Nous partons en voyage, je me sens intouchable.